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Origine douanière : actualité des accords, preuve et stratégie pour les opérateurs

Transport - Douane
07/02/2024
Lors du Symposium Douane organisé par le magazine Classe Export le 1er février 2024, la Douane fait un point sur les accords commerciaux de l’UE et annonce des nouveautés à venir s’agissant de la preuve et du RCO notamment. Une occasion aussi pour les opérateurs-témoins d’attirer l’attention sur les enjeux et la gestion de l’origine.
Accords de commerce : actualité et avenir
 
Après avoir rappelé le rôle d’accompagnement des opérateurs par la Douane en matière notamment d’origine, Yann Ambach, le responsable du bureau de la politique tarifaire et commerciale à la DGDDI, met en avant les trois accords de l’UE qui font l’actualité et entreraient prochainement en vigueur :
- celui avec la Nouvelle-Zélande qui sera ratifié bientôt par les parlements européen et néo-zélandais (il porte sur un peu moins de 9 milliards d'euros d’échanges) ;
- un accord avec le Kenya (concernant notamment les produits agricoles) ;
- et l’accord avec le Chili, accord de 2e génération.
 
Il ajoute que les négociations vont reprendre avec des pays avec lesquels elles étaient arrêtées début 2010 : l’Inde, l’Indonésie et l’Australie notamment.
 
Enjeux financiers des accords. – L’UE est la première zone à passer des accords avec les autres États : elle dispose de 47 accords commerciaux, 48 si l’on compte celui avec la Nouvelle-Zélande signé en 2023. Ils représentent 44 % des échanges commerciaux (en 2022). Les opérateurs peuvent réaliser des économies de droit de douane à l’importation et à l’exportation grâce à ces accords : ceux-ci, par exemple, ont permis à l’exportation une « économie tarifaire estimée » de 2,7 milliards d’euros (chiffre de 2021) ; à titre d’exemple encore, 84 % des exportations de la France vers le Royaume-Uni recourent à l’accord entre ces deux partenaires, permettant ainsi de réaliser 93 % d’économie de droit de douane. Les résultats de l’enquête de la DG Trésor sur l’utilisation des préférences commerciales sont également rappelés (voir Utilisation des accords commerciaux de l’UE : présentation du rapport de la DG Trésor aux opérateurs, Actualités du droit, 6 déc. 2023).
Se faire entendre. – La méthode de négociation des accords est rappelée tout comme la possibilité pour les opérateurs de faire entendre leurs voix. En effet, si la négociation relève de la compétence de l’UE, la Direction générale du Trésor est l’administration qui porte la position de la France auprès de la Commission et la Douane est une des administrations partenaires de cette DG-ci. La DGDDI prend l’attache des grands groupes jusqu’aux PME, sans oublier les secteurs sensibles, par la consultation de leurs représentants. Bien sûr, plus les retours des opérateurs et de leurs représentants sont exposés en amont, meilleure est la présentation de la position de la France dans la négociation.
 
Preuve de l’origine et renseignements contraignants
 
Après avoir rappelé les divers modes de preuve de l’origine dans les accords, Yann Ambach annonce à nouveau la mise en ligne à venir de fiches rédigées par la Douane sur ces preuves, accord par accord : à destination des opérateurs, ces fiches auront pour but de leur faciliter la tâche et faire œuvre de pédagogie. La diffusion devrait avoir lieu après la mise en œuvre de l’accord avec la Nouvelle-Zélande.
 
De plus, s’agissant des renseignements contraignants sur l’origine (RCO), une campagne de communication pour familiariser les opérateurs à cet outil de sécurisation juridique de l’origine va avoir lieu (à la suite du Brexit, plus de 400 demandes de RCO avaient été déposées, mais désormais leur nombre est retombé à 30 ou 35 par an). Avec le projet de loi simplification de Bruno Le Maire qui sera présenté au printemps 2024, les rescrits fiscaux, sociaux et douaniers seraient améliorés, de sorte que les entreprises disposent de l’information plus rapidement : le RCO est concerné, tout comme le RTC.
 
Dans le projet de loi de simplification à venir, deux grandes mesures sont aussi proposées par la Douane, selon Guillaume Vanderheyden, le sous-directeur du commerce extérieur à la DGDDI :
  • d’une part, le renforcement de l’accompagnement des opérateurs par cette administration via la Mission Action Économique et Entreprises (MA2E) et les Pôles d’action économique (PAE) ;
  • d’autre part, l’amélioration de la lisibilité (l’accessibilité) de la « doctrine » douanière par la création d’une bibliothèque avec l’ensemble des documents, comme les notes aux opérateurs ou les BOD : si tout est déjà sur le site de la Douane, encore faut-il parfois le trouver, l’idée étant donc d’améliorer aussi la visibilité de ces documents.
À propos des renseignements contraignants, celui sur la valeur, le RCV, devrait connaitre un report, selon Yann Ambach : il faut l’attendre pour 2026-2027 et non plus 2025, ce décalage étant consécutif au projet de réforme de l’Union douanière et du CDU de la Commission européenne qui tourne ses forces vers la réécriture de ce Code.
 
Intérêts et gestion de l’origine par les entreprises
 
Pour identifier l’utilité de l’origine préférentielle (OP), une « stratégie des accords commerciaux » doit être mise en place par les opérateurs, selon Maeva Paqueriaud, la responsable Douane de Michelin. Elle liste notamment les points suivants que les entreprises doivent examiner et prendre en compte pour l’élaboration de cette stratégie :
  • le type de produit : il détermine les règles d’origine à appliquer qui sont plus ou moins compliquées ;
  • le taux des droits de douane : aller chercher un accord là où le taux est faible n’est pas prioritaire (a fortiori bien sûr lorsque le taux est de zéro) ;
  • la faisabilité opérationnelle (sa mise en œuvre) : si, selon les accords, il faut opérer des changements dans les process logistiques/physiques, cela aura un impact documentaire pour l’équipe douane et pour toute la chaine de valeur : il faut donc prêter d’autant plus d’attention à ce sujet si les changements concernent la chaine logistique, y compris par exemple le transport ;
  • la certification de l’origine, notamment lorsque cela peut aboutir à des gestions manuelles (avec des risques d’erreur de saisie).
 
Et pour finir, il faut « calculer les gains et les partager en interne » avec les achats, la logistique, etc., pour évaluer si un bénéfice global existe.
 
Romuald Hori, responsable douane NTN Europe, souligne aussi d’autres enjeux/risques à prendre en compte quant aux pays d’origine : les droits antidumping, les contingents (avec le risque de droits de douane supplémentaires lors du dépassement des contingents), la guerre commerciale (avec les USA par exemple ce qui entraine une « surtaxe » sur les aciers) et plus récemment le MACF. S’agissant des droits antidumping, Yann Ambach avance que la Douane peut accompagner les opérateurs pour trouver d’autres sources d’approvisionnement. S’agissant des contingents et suspensions tarifaires, il rappelle qu’ils permettent des économies de droit de douane de l’ordre de 120 millions à chacun des deux rounds de négociation.

« Made in France »
 
Sur le sujet du « Made in France » qui est un atout à l’exportation, le sous-directeur du commerce extérieur à la DGDDI confirme la dématérialisation à venir de la procédure actuellement papier de demande d’« IMF », l’information sur le « made in France » que peuvent solliciter les opérateurs auprès de la Douane.

 
Source : Actualités du droit