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Expert-comptable avant la loi Pacte : nullité du contrat prévoyant des honoraires de résultat

Civil - Contrat
12/04/2022
La Cour de cassation rappelle qu’avant 2019 l’expert-comptable ne pouvait être rémunéré que par des honoraires dont le montant était déterminé en fonction du travail fourni et du service rendu. Le contrat qui ne respectait pas cette règle déontologique était illicite et nul.
Un expert-comptable assiste une société à l’occasion de la cession de ses actions. Les parties se mettent d’accord oralement sur un honoraire de résultat. L’expert-comptable assigne sa cliente en reconnaissance d'un contrat de louage d'ouvrage et paiement de la rémunération prévue dans un sms de son dirigeant. La société conteste l'existence d'un tel contrat et conclu, subsidiairement, à sa nullité en ce qu'il prévoyait uniquement des honoraires de résultat.

La cour d’appel retient que le contrat de louage d’ouvrage litigieux, prévoyant des honoraires de résultat, n’encourait pas la nullité. Elle fait droit à l’expert-comptable. La société se pourvoit en cassation ; elle invoque la règle selon laquelle la fixation d'un honoraire de résultat constitue un manquement aux règles déontologiques d'ordre public gouvernant la profession d'expert-comptable.
 
L’arrêt est cassé. Selon l'article 24 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2014-443 du 30 avril 2014, les honoraires de l'expert-comptable doivent être « équitables et constituer la juste rémunération du travail fourni comme du service rendu » (al. 2) et « ne peuvent en aucun cas être calculés d'après les résultats financiers obtenus par les clients » (al. 3).
« Un contrat conclu entre un expert-comptable et son client, en ce qu'il fixe les honoraires dus en fonction de tels résultats, est illicite et, partant, nul, de sorte que le montant des honoraires dus à l'expert-comptable doit être déterminé en fonction du travail fourni et du service rendu ».

L'arrêt a retenu, à tort, que les règles de déontologie, dont l'objet est de fixer les devoirs des membres de la profession, ne sont assorties que de sanctions disciplinaires et n'entraînent pas, à elles seules, la nullité des contrats conclus en infraction à leurs dispositions et que la cliente invoque une contrariété à l'ordre public sans toutefois la caractériser ni même l'expliciter. La cour d'appel a violé le texte susvisé.
 
Remarque : cette affaire s’est déroulée en 2016. La « loi Pacte » n° 2019-486 du 22 mai 2019 a rétabli la possibilité pour l’expert-comptable d’être rémunéré, en complément d'honoraires de diligence, par des honoraires complémentaires (Ord. n° 45-2138, 19 sept. 1945, art. 24). Ces honoraires sont calculés par rapport à la réalisation d’un objectif préalablement fixé par écrit avec le client ; ils s’appliquent à toutes missions hors les missions comptables exercées à titre principal et celles participant à la détermination de l’assiette fiscale ou sociale du client.
Source : Actualités du droit